L’église Saint-Cyr et Sainte-Julitte

La découverte de Pomérols, village viticole typique de la région languedocienne, est une expérience tout à fait inoubliable. Ses façades, remontant aux XIVe, XVe et XVIe siècles, lui confèrent un charme indéniable, mais c’est la visite de l’église Saint-Cyr et Sainte-Juliette-de-Pomérols qui réserve une expérience véritablement exceptionnelle.

Cette église, datant du XIIIe siècle, se dresse fièrement, arborant une façade à l’apparence robuste et fortifiée. Cependant, une fois à l’intérieur, elle dévoile un véritable chef-d’œuvre d’artisanat. Son retable baroque, superbement sculpté dans le bois, brille de feuilles d’or. Daté du XVIIe siècle, ce trésor artistique est classé Monument historique, ajoutant ainsi une dimension toute particulière à la richesse culturelle et artistique de ce lieu unique. Une visite à Pomérols s’impose pour quiconque cherche à s’imprégner de la beauté et de l’histoire de cette région pittoresque.

Les églises situées dans le département de l’Hérault présentent une rareté en matière de retables datant du XVIIe siècle. Cependant, une documentation exceptionnellement abondante éclaire notre connaissance sur ces précieux “monuments” tout en nous révélant les talents des innombrables artistes et artisans qui les ont conçus. Répertoriés jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, notamment dans les inventaires réalisés pendant la Révolution, il est vraisemblable que ces magnifiques retables aient progressivement disparu au cours du XIXe siècle.

Parmi les exemplaires préservés, certains ont fait l’objet d’études approfondies, tels que celui de l’église Sainte-Ursule à Pézenas, de l’église Saint-Mathieu à Montpellier, ou encore de l’église abbatiale de Saint-Thibéry. En revanche, d’autres, comme ceux situés à Abeilhan, Montagnac, Bessan, ou Notre-Dame du Peyrou à Clermont-l’Hérault, ont sombré dans l’oubli et demeurent connus seulement de quelques paroissiens et érudits. Tous ces retables présentent des qualités artistiques remarquables, cependant, le retable de l’église Saint-Cyr et Sainte-Julitte de Pomerols se distingue particulièrement. Classé monument historique depuis le 1er mai 1950, il est associé à une documentation exceptionnelle jusqu’alors inédite. Cette précieuse source permet de retracer son histoire, de restituer ses dispositions d’origine, de comprendre les éventuelles modifications qu’il a subies, et d’approfondir notre connaissance des artisans tels que les menuisiers, sculpteurs, doreurs, et peintres qui ont contribué à sa création et à l’ornementation de l’église au XVIIe siècle.

HISTOIRE DU RETABLE

Le 18 novembre 1675, un événement majeur se déroule à Pomerols lorsque les consuls de la ville et le responsable de la Fabrique ( terme uti de l’église Saint-Cyr et Sainte-Julitte concluent un contrat avec “Jacques Cindrau, maître menuisier de Frontignan”, en vue de la création du retable, du tabernacle, et du marchepied du maître-autel de l’église paroissiale. Leur réalisation doit s’aligner sur les plans élaborés par le sculpteur de renom, Pierre Calvet de Pézenas, et ce, dans un délai d’un an, à partir de Pâques 1675. Pour ses talents artistiques, Calvet recevra une rémunération de 30 livres, que lui versera Cindrau, prélevée ultérieurement sur le montant total du projet, estimé à 1 520 livres. Il est stipulé que le retable doit être inspecté et approuvé en personne par Calvet, pour s’assurer de sa conformité aux dessins originaux. Malheureusement, le projet ne parvient pas à son terme, et l’exécution du mobilier est retirée à Cindrau, bien que les raisons de cette décision demeurent obscures.

L’année suivante, une nouvelle adjudication est accordée à un autre sculpteur, Jean Cannet de Pézenas. Sa mission consiste à réaliser le retable, le tabernacle, le marchepied de l’autel, ainsi que des bancs, bien que leur emplacement précis ne soit pas spécifié. La valeur totale des travaux s’élève à 1 905 livres. Jean Cannet s’engage formellement à suivre le modèle initial fourni par Pierre Calvet, tout en promettant de rembourser à Cindrau les 30 livres que ce dernier avait versées à Calvet pour la réalisation des dessins. La garantie de la qualité de l’ouvrage est assurée par la caution de deux individus, à savoir Michel Parin et le maître-doreur de Pézenas, Balthazar Trigit.